
Adam Lebon « Mon double projet N1-N3 est très motivant »
A 22 ans, le Bondynois de Livry-Gargan s’entraine avec la N1 de l’Elite Val d’Oise Handball et y performe en N3 le week-end. Pour le moment. Un double projet qui motive cet ailier efficace, précis tireur de penalties, aussi à l’aise dans le jeu. Jeune frère de Théo, qui a joué avec Saint-Gratien Sannois, il veut grandir dans ce projet en même temps que ses études en Biomédical. Tout un programme pour un garçon heureux de vivre en musique, sur le terrain, en famille, en cours et qui rêve de disputer la CAN !
Elite Val d’Oise Handball : Membre du groupe de la N1 parmi 17 joueurs, tu évolues pour le moment avec la N3. Comment vis-tu cette situation particulière à 22 ans ?
Adam Lebon : « Nous sommes 17 avec six arrivées, un groupe d’expérience et de bons joueurs. La concurrence est plutôt soutenue. J’avais donc vu avec Safwann que je serais peut-être amené à jouer avec la N3. Pour le moment, j’ai fait tous les matches avec eux, mais toute la prépa aussi avec la N1 et les entraînements la semaine avec eux. »
Elite Val d’Oise : Ce mode de fonctionnement n’est-il pas difficile ?
A.L. : « Je l’ai assimilé. C’est difficile, car je suis un compétiteur, comme tous les joueurs. Je veux jouer le plus haut possible le plus longtemps possible. C’est un peu frustrant, mais ce n’est pas la fin du monde, car je joue en N3, un niveau que je connaissais pas et avec un groupe dans lequel je suis un des plus vieux, avec un temps de jeu différent et des responsabilités, un rôle de cadre. Je suis même le meilleur buteur pour le moment et je tire les penalties. En N1, je suis presque le plus jeune, juste derrière Max (le jeune pivot Maxime Mantey, 18 ans). »
EVO : La N1 comme la N3 vivent un début de saison difficile. Où se situent les problèmes ?
A.L. : « En N1, je me demande. Le groupe vit vraiment très bien. On a connu une très bonne prépa. Lors du stage à Annecy, l’ambiance était terrible. On prend du plaisir. Mais il manque le déclic. On avait battu Ivry, Tremblay, Annecy et perdu contre Montpellier et Paris. Depuis le début de saison, il manque un petit quelque chose juste. Ça tient à rien. On va trouver. Sur la base arrière, trois nouveaux sont arrivés. Il faut développer ce jeu et s’adapter. Les automatismes doivent se trouver en défense. Au poste de pivot, pareil avec l’arrivée tardive de Mehdi, alors qu’au début, avec la blessure de Yass’, c’était Djordan et Armand qui tournaient. On est tout le temps en train de chercher des réglages. On a peu joué avec l’équipe complète. On est proche de gagner. On n’est pas à la rue, on a rencontré des grosses équipes de la Poule Elite et pas que des promus. »
EVO : Et en N3 ? Il vous manque un ou deux anciens joueurs d’expérience, avec un jeu à trouver ?
A.L. : « On a un groupe très jeune. On sort aussi de deux années de Covid-19. La dernière saison complète de certains remonte à leur période de U18. Un championnat National, c’est autre chose. On peut rencontrer des joueurs très expérimentés. La différence d’expérience a un rôle à ce niveau. On a un groupe jeune, mais qui en veut, avec un jeu très rapide. Ça court pendant 60 minutes. Ça va fonctionner. Quand on perd à Calais, l’adversaire était très expérimenté. Le reste des résultats ne sont pas inquiétants. »
EVO : Parlons de toi. Tu as toujours été ailier ?
A.L. : « J’ai commencé le Hand ailier, à mes débuts à Livry-Gargan. En U17, je suis passé plus sur la base arrière et j’ai joué demi-centre. Quand je suis arrivé au Paris SG en U18, je suis passé arrière et ailier et enfin en Séniors au PSG, je suis resté ailier. »
EVO : Quelles sont tes qualités et tes défauts ?
A.L. : « Mon efficacité est ma qualité numéro 1. Je m’applique à être irréprochable. A l’aile sur des décalages, mais aussi comme je suis le tireur des penalties, sur cet exercice aussi. J’ai aussi une assez bonne vision du jeu. Je peux sortir de mon aile pour participer au jeu et faire de bonnes passes, déclencher des solutions. Un défaut, c’est paradoxal pour un ailier, mais je dirais ma vitesse. Je ne suis pas assez rapide en contre-attaque. Je compense par mon anticipation et ma lecture. »

EVO : Ton petit gabarit d’ailier comme Romaric (Biglietti, ils mesurent 1,80 m et 1,82 m) n’est pas handicapant à ce poste dans le Hand d’aujourd’hui ?
A.L. : « Non. Quand on voit en D1 des petits gabarits comme Luc Steins (le demi-centre Néerlandais du PSG mesure 1,73 m) changer le jeu, cela annonce une nouvelle ère avec le retour des petits demi-centres. Il peut jouer partout sur la base arrière. A l’aile, ce n’est pas dérangeant et ça peut permettre de se cacher derrière un numéro 2 pour intercepter la balle. Si on est un peu technique, on peut tirer en-dessous plutôt que de tirer au bras. Les défenseurs peuvent être sanctionnés. Il n’y a pas que des désavantages à être petit. »
EVO : Michaël Guigou et Luc Abalo ne mesurent que 1,81 m et 1,83 m…
A.L. : « Oui. Et on les a vus évoluer sur la base arrière. »
EVO : Dans ton parcours de tes débuts à Livry-Gargan jusqu’à ton arrivée à l’Elite, comment s’est passée la transition entre le Paris SG, où tu étais arrivé en 2015 et l’Elite Val d’Oise Handball ?
A.L. : « Je suis arrivé en juillet 2020 à l’Elite, en même temps que Djordan (Bourgrainville). Pendant la période du Covid-19, j’avais été contacté par plusieurs équipes, mais je ne voulais pas forcément partir. J’avais discuté avec mon coach, Thierry Perreux qui comptait sur moi pour devenir un cadre. Comme c’est un Centre de formation, des joueurs partent souvent ou restent. Il m’a dit que je deviendrais un cadre en N1 pour un peu chaperonner les jeunes. Mais l’Elite a contacté mon frère, Théo (il a joué un an en 2018-2019 avec Saint-Gratien avant de rejoindre Savigny HB 91) pour revenir. Il a refusé le projet. Mais il m’a dit d’y aller, car le club est sérieux, comme le projet. Il m’a dit que ce serait bien pour moi, car je ne suis passé par aucune sélection départementale, ni régionale, aucun parcours d’excellence sportive ou pôle… Un parcours atypique pour un joueur de ce niveau. Au départ, j’étais partenaire au Centre de formation du PSG, un des deux seuls joueurs sans expérience de l’excellence. Quitter le PSG pour rejoindre une équipe visant la Proligue était cohérant. L’Elite a fait venir Djordan du PSG et les dirigeants lui ont demandé s’il ne connaissait pas un ailier. Il a parlé de moi et m’en a parlé. C’est parti comme ça..
EVO : Théo est plus âgé. Parle-nous de vous. Il est ailier comme toi ?
A.L. : « Oui. On a deux ans d’écart. Quand on était ensemble à Livry-Gargan, parfois j’étais surclassé et on jouait ensemble. Il était ailier et je passais demi-centre ou lui arrière et moi ailier. C’était sympa. On s’est aussi retrouvé en décembre 2020 en stage avec l’Equipe nationale de la Guinée. Parfois, on alterne arrière et ailier. J’espère que je ferai la CAN 2022 avec la Guinée. C’est mon objectif. Lui, il l’a disputée il y a deux ans, avec Boubou Touré, un autre ancien joueur de l’Elite. Nous sommes présélectionnés tous les deux pour un prochain stage, peut-être en France début novembre avant la sélection finale et un dernier stage en décembre vraisemblablement en Guinée. La compétition a lieu au Maroc du 13 au 22 janvier prochain. Ce serait super d’y être (de l’Elite Val d’Oise Handball, Lahcen et Mehdi font partie du groupe marocain. Adam, avec Armand et Wilhelm (et donc Théo parti à Savigny) sont pressentis avec la Guinée et Segz avec le Gabon). Théo est rentré de la Coupe d’Afrique il y a deux ans avec des étoiles dans les yeux ! Le niveau est très bon. Tu rencontres l’Egypte, la Tunisie, le Maroc qui a fait la Coupe du Monde. C’est une expérience incroyable. Notre entraîneur, Kevin Decaux a entrainé les Filles de la Guinée et du Maroc aussi. J’espère y être vraiment ! Chris aussi a déjà fait la CAN. »
EVO : Que fais-tu en dehors des entraînements et des matches avec l’Elite ?
A.L. : « Je suis en 3e année de Licence Biomédicale. C’est le même cursus et la même école que faisait Martin (Oliver) qui travaille aujourd’hui. Je le connaissais avant de signer à l’Elite. On échangeait sur nos cours, nos matches, on jouait avec la Fac. C’était rigolo. Il travaillait à l’école au laboratoire de la Fac (Descartes à Saint-Germain-des-Prés). Et dès que j’avais un souci, il me rassurait, me proposait de venir le voir, discuter. C’est ma dernière année de Licence. Soit j’envisage le Master, soit je me réoriente dans la recherche en chimie. »
EVO : Quelles sont tes passions ?
A.L. : « Je suis très proche de ma famille. Le Hand et la Fac me prennent beaucoup de temps. Je vis en famille avec mes parents et notre petite sœur à Livry-Gargan. Théo rentre aussi. J’écoute aussi beaucoup de musique, à tout moment de la journée. La musique, c’est un rythme de vie, tout le temps dans les oreilles. »

EVO : Théo et toi jouez au Hand. Ta sœur joue aussi ou tes parents ?
A.L. : « On a essayé de la mettre au Hand. Ce qui est amusant dans la famille, c’est que les parents sont droitiers et les trois enfants gauchers. Des gauchers au Hand… On a essayé avec Théo de la placer en club. Elle bouffe du Hand depuis qu’elle est petite dans tous les gymnases. La logique aurait été qu’elle joue. Mais c’est une danseuse ! Quand on a réussi à l’inscrire au Hand, la seule chose qu’elle faisait, c‘était de danser sur le terrain et comparer ses chaussures avec l’adversaire. Pourtant, elle a fait des stages en sélection départementale. Elle a 17 ans. Nos parents ont joué un peu à l’AS au collège, mais pas plus. Mon père a fait du Judo, lui. Avec mon frère, on a testé beaucoup de sports et fait pas mal de Judo. Un jour, on a accompagné ma cousine à une initiation Handball. Là-bas, on a adoré. Théo s’est inscrit. Moi, j’ai fait un an de plus au Judo et j’allais le voir. Un an après, je m’y suis mis, à 8 ans. »
EVO : Pour la musique, tu as trouvé ton clan musique dans le groupe de la N1 ?
A.L. : « On marche tous dans la même direction (il rigole). En déplacement, je suis toujours avec Djordan. On a notre rituel musique. On a les mêmes goûts. Avec mon enceinte, on en écoute même pendant la sieste. Une musique très large, variée, selon les humeurs, Rap, Zouk et autres… Je ne critique pas la musique de Lucas et Simon (il rigole). J’écoute de tout. Ça me va. Même la commission musique de Chris ou William. »
EVO : Pur parisien, tu aimes le foot ?
A.L. : « Je suis un peu le foot, surtout le PSG. Je ne suis pas un passionné, mais j’aime bien. Avec Romaric parfois, dans un coin du vestiaire, on se met à taper doucement sur le mur en chantant des champs de supporters parisiens pour énerver certains. »
EVO : Un certain fan de l’OM dans l’équipe (Omar Benali) ?
A.L. : « (Il éclate de rire) Oui. Le joueur le plus expérimenté de l’Elite ! »
EVO : Tu es né à Bondy. Donc, tu es donc le 2e sportif le plus connu de la ville après Kylian Mbappé !
A.L. : « Le 3e ! Chris est né aussi à Bondy. Comme il est plus âgé, je respecte l’ordre ! »

EVO : Quelles sont tes ambitions avec l’Elite Val d’Oise Handball ?
A.L. : « Je suis en contrat pour une saison encore. Mais j’ai envie de laisser ma trace ici. C’est un projet sur le long terme qui me plaît beaucoup. Je suis jeune et je veux prouver que j’ai ma place, performer. La Proligue, c’est un projet intéressant. J’ai un peu côtoyé les pros quand j’étais au PSG. C’est un autre monde. J’ai envie de goûter à ça. J’aime bien le club, l’ambiance, la structure, les supporters, les bénévoles… On est poussé en permanence. C’est chaleureux et positif. Je vais même y travailler une dizaine d’heures par semaine, comme Service Civique en plus du Hand et de l’école ! »
EVO : Tout cet allant peut mener au professionnalisme ?
A.L. : « Je ne connais pas le niveau et je ne sais pas ce qui s’est fait avant avec Saint-Gratien Sannois. Mais je ne vois pas de facteur alarmant qui interdirait une éventuelle montée. »
EVO : Dernière question : j’ai vu que tu as fait Koh-Lanta ? Raconte-nous.
A.L. : « Il faut que je surveille ma vie privée sur les réseaux. On trouve de tout sur Internet ! Pendant le confinement, beaucoup ont mal vécu la période. Nous, on a eu la chance que ce confinement se passe très bien dans la famille. Nous sommes issus d’une famille de soignants, mes parents et ma tante. Du coup, nous les jeunes, nous étions exposés aux risques de contamination. Pendant ce confinement, comme on vit dans deux maisons proches, on a fait le choix de faire deux maisons séparées, une avec les parents et une avec les enfants confinés. On était avec mon frère, ma petite sœur, ma grande cousine et deux petites cousines en autogestion. J’ai adoré. Il fallait surveiller les devoirs des plus jeunes. Au début, on jouait aux cartes, on écoutait de la musique. Puis on a eu l’idée de se faire des épreuves pour rigoler. Ma cousine est dans la communication. Elle a proposé de faire une page Insta’ pour regrouper et montrer nos aventures, nos jeux quotidiens… Et tout d’un coup, cette page Insta’ a pris de l’importance. On nous suivait, on nous demandait les nouvelles épreuves. C’était super sympa. Comme on est une famille de sportifs, personne ne voulait perdre dans nos activités. On nous a dit que l’on a réussi à faire rire d’autres personnes, les divertir à travers Internet ! On ne pouvait pas sortir… On n’avait pas de script, on réfléchissait à nos activités, et voilà. Ça renforce les liens familiaux. Soit ça casse ces moments de confinement, soit ça rapproche. Nous, ça nous a rapprochés encore plus de vivre comme ça. De l’autre côté, mes parents et ma tante travaillaient et avaient la pression de la maladie. Ça les faisait décompresser. »
EVO : Prochaines activités, un dernier match avant la trêve, ce week-end, et les vacances. La N1 joue à Saintes, la N3 à Courmelles, deux matches contre le dernier de la Poule. A gagner !
A.L. : « Dans tous les cas, ce sont des matches difficiles à gagner absolument ! En N1, le championnat est hyper serré. En N3, pareil. Mon double projet N1-N3 est très motivant. J’ai dans chaque collectif mes objectifs personnels et collectifs. Un objectif t’aide à garder une certaine rigueur, qui t’aide à avoir des résultats. Alors deux… »
EVO : Après, vacances !
A.L. : « Oui et non. J’ai une semaine de… repos avec l’Elite ! Mais avec l’école, pas de vacances. Je ne peux pas partir, j’ai cours. Prochaines vacances en décembre à Noël ! »

Interview : Frédéric Thoos (EVO)
Photos : Mathilde Plotton, Vanessa Broussier Moreau, Martine Riche (EVO)